Les Phytohormones
L'utilisation des phytohormones n'est pas indispensable pour obtenir de bons résultats, la plupart des espèces s'en passent. Par contre, quand la plante cultivée ne se prête pas au microbouturage comme certaines espèces de Nepenthes par exemple leur utilisation devient nécessaire.
Les phytohormones sont présentes à l'état naturel dans les plantes à des quantités de l'ordre du microgramme par litre. Elles interviennent dans des phénomènes de régulation, d'inhibition, de promotion...Elles agissent en synergie les unes avec les autres et le moindre déséquilibre peut avoir des conséquences importantes.
En culture in vitro, nous allons utiliser trois type d'hormones de croissance, soit de synthèse, soit naturelle. Les hormones de synthèse sont moins chères, résistent mieux à la chaleur (autoclave) tandis que les hormones naturelles seront mieux métabolisées mais sont souvent thermolabiles.
Il faudra dans ce cas incorporer la solution d'hormone après la stérilisation des milieux de culture (voir détails ici).
- Les auxines
Ensemble de molécules qui ont pour point commun d'avoir la même distance entre la charge négative portée par le groupement carboxyle COOH(sous sa forme dissociée) et la charge positive plus faible portée par le reste de la structure fixe (0,55nm).
Il en existe des naturelles, c'est à dire synthétisées par les plantes ou des synthétiques issues de l'industrie chimique.
Les auxines d'origine naturelles (l'acide indole-3-acétique, l'acide 3-indole-butyrique et l'acide 4-chloro 3-indole acétique) seront mieux assimilées par les plantes mais sont plus ou moins thermolabiles.
Pour les utiliser, il faudra les introduire dans le milieu de culture après l'avoir stérilisé, à l'aide d'une seringue munie d'un filtre 0,22 µm.
Les auxines d'origine synthétiques (acide 2,4-dichlorophénoxyacétique (2,4-D), l'acide 2-méthoxy-3,6-dichlorobenzoïque (Dicamba), l'acide 2,4,5-trichlorophenoxyacétique (2,4,5-T) ou encore l'acide 1-naphtalène acétique (1-ANA)) sont très puissantes et résistent à la chaleur. Elles sont beaucoup plus simple d'utilisation en culture in vitro.
Vous retrouverez ci-dessous la formule semi-développée de quelques unes d'entre elles.
Leur action physiologique varie suivant leur concentration et la présence ou non d'autres hormones.
En général elle sont à l'origine de:
- l'allongement cellulaire
- la stimulation de la mitose (division cellulaire) ce qui conduit à la formation d'un cal (amas de cellules indifférenciées)
- la rhizogénèse (formation de racines).
La photographie ci-dessous montre des Cattleya aurea sur un milieu de Knudson complémenté d'auxine et de cytokinine ([Auxine]=0,5 mg.l-1; [cytokinine]=0,1mg.l-1).
Ci-dessous, une photographie de production de cal de Drosera regia sur un milieu MS/3, [Auxine]=1mg.l-1
Remarque: L'agent orange utilisé par l'armée des États-Unis lors de la guerre du Viêt Nam entre 1961 et octobre 1971 est un mélange à parts égales de deux auxines de synthèse : l'acide 2,4-dichlorophénoxyacétique (2,4-D) et l'acide 2,4,5-trichlorophénoxyacétique (2,4,5-T).
- Les cytokinines
Elles agissent en synergie avec l'auxine au niveau de la division cellulaire :
- rôle dans l'organogénèse (favorise la formation de bourgeons)
- antagoniste à la rhizogénèse
- action stimulante sur le métabolisme
- levée de la dominance apicale.
L'utilisation de cytokinine est particulièrement adaptée à la levée de dominance apicale (photographie de Nepenthes reinwardtiana ci-dessous) afin de promouvoir les bourgeons présents à l'aisselle de chaque feuille. De cette façon, on peut obtenir très rapidement plusieurs clones (multiplication végétative).
Le Thidiazuron (TDZ)
Bien que ce ne soit pas une cytokinine, le TDZ est considéré comme plus puissant que la plupart d'entre elles.
Il est généralement utilisé en culture in vitro de plantes ligneuses (arbustes, arbres).
Pour ce qui nous concerne, des concentrations de l'ordre de 0,01 mg.L-1auront le même effet que les autres cytokinines dosées à 0,1mol.L-1.
A plus forte concentration, il y aura production de call.
- Les gibbérellines
Ensemble d'hormones présentant chacune le même type d'action mais à intensité variable. En culture in vitro, on utilisera essentiellement la GA3.
Personnellement, je n'utilise le GA3 que pour sa propriété de levée de dormance de graines (Darlingtonia, Sarracenia, Drosera tubereux...)
Les principales propriétés appliquées à la culture in-vitro sont les suivantes :
- élongation entre les nœuds
- développement des méristèmes
- effet stimulant sur le métabolisme, notamment sur la synthèse des auxines
- action complexe dans les phénomènes de levée de dormance, soit sur les semences, soit sur les bourgeons.
Pour germer, les graines de Drosophyllum lusitanicum (photographie ci-dessous) doivent être trempées dans une solution de GA3 à 500mg.l-1 pendant 24 heures puis scarifiées, ici sur un milieu MS/3.
En fonction de leur concentration respective, l'utilisation simultanée d'auxine et de cytokinine va induire des réponses différentes:
Si le rapport auxine/cytokinine est élevé on favorise la formation de racines.
Si le rapport auxine/cytokinine est faible on favorise la formation de bourgeons.
Si le rapport est voisin de l'unité on favorise la formation d’un cal.
Glossaire
Dominance apicale
La dominance apicale est le phénomène par lequel l'axe principal d'une plante croit plus vite que ses ramifications.
Ce phénomène est expliqué par l'inhibition des bourgeons latéraux par l'auxine, une phytohormone secrétée par le bourgeon terminal.
thermolabile
La thermolabilité est la propriété d'une substance à être détruite, décomposée ou à changer de propriétés lorsqu'elle subit une élévation de température.